PLUS D'UN SIECLE D'ANECDOTES FORAINES

Publié le 10/04/2017 dans HISTOIRES FORAINES

Depuis leur parution, « L’Intermédiaire Forain » et « L’Inter Forain » recèlent de mille et une anecdotes sur la fête et les forains. Nous en dévoilons quelques-unes glanées à travers la lecture du « Rose », soit plus d’un siècle d’histoire foraine, certaines anecdotes datant d’avant la parution du journal.

 

1893 : PREMIERE ECOLE FORAINE

C’est à Paris, qu’Eugénie Bonnefois créa la première école foraine. Née en 1830, « Nini », dont le père tenait le Théâtre Bonnefois, avait fondé une œuvre, « Notre Dame des Forains », pour évangéliser les forains, et cherchait depuis plusieurs années, les moyens nécessaires pour créer une école qui suivrait les foires.

Ce qui fut fait en 1893, à la fête des Invalides, à paris, où Eugénie prit possession d’une petite baraque de 4 mètres carrés montée à côté de son « Panorama » : des planches posées sur des tréteaux tenaient lieu de tables et les bancs accueillaient une vingtaine d’enfants !
Après les Invalides, Eugénie monta à la fête de Neuilly. La roulotte école suivit, mais dû être installée près du Pont de Courbevoie faute de place. Résultat : il lui fallut alors louer un char à bancs pour parcourir toute l’avenue depuis la Porte Maillot jusqu’au pont de Courbevoie afin d’aller chercher et ramener tous les petits forains. Sans compter les parents qui, peu habitués à voir leur progéniture quitter le métier pour aller à l’école, rappelaient en permanence à Eugénie qu’ils avaient besoin d’eux à telle ou telle heure de la journée…

En 1910, celle qui fut surnommée la « Bonne Fée » des forains était à la tête de trois roulottes écoles. Elle s’est éteinte le 16 juin 1914.

 

1902 : LE  « VOYAGE DANS LA LUNE »

Georges Meliès aimait les forains… Des films en témoignent : « Chevaux de bois », « Cake-Walk Infernal », « Panorama pris d’un chemin de fer électrique », « L’Homme orchestre », etc.
D’ailleurs, ne présenta-t-il pas son… « Voyage dans la Lune » dans un cinématographe forain de la foire du Trône en 1902 ?
N’en vendit-il pas aussi les copies aux forains, ainsi que de nombreux autres films qu’il tourna dans ses studios de Montreuil-sous-Bois et qui firent la joie du public ?
Ses « trucages » furent exploités dans les Music-Hall et sur les champs de foires, telles la Sybille de Cumes ou la Métempsychose, qui connurent le succès dans les années 1888 -1896. D’autres innovations signées Méliès furent aussi présentées et exploitées dans les Electric Palace et autres Palais des Sciences forains…

 

1906 : CHASSE A L’OURS DANS PARIS

On pouvait lire à la « Une » du Petit Journal du dimanche 29 juillet : « Une chasse à l’ours en plein Paris ». Et l’article, en pages intérieures, d’expliquer qu’« alors que la fête des Gobelins, place d’Italie, battait son plein, un ours brun s ‘échappa de sa cage de la ménagerie Darius. Un employé le pourchassa, mais voulant s’emparer de la bête, il se fit mordre la jambe et dû être transporté à l’hôpital Cochin. Des gardiens de la paix finir par l’abattre alors qu’il s’était réfugié dans une porte cochère ! ».

 

1909 : NAISSANCE DE L’INTERMEDIAIRE FORAIN

L’année 1909 constitue l’An 1 de L’Intermédiaire Forain… Si le monde de la fête célèbre sa naissance au mois d’avril, c’est une année difficile car les artisans de la fête sont en deuil en fin d’année avec la disparition de Bidel, de Socrate Mignon et d’Edouard Janselme figures connues et appréciées du monde forain alors que la direction du journal s’apprête à sortir sur papier « rose ». Le premier « Rose » imprimé sur papier rose datant, en effet, de janvier 1910 !

 

1919 : TOUT PARIS A LA FOIRE AU PAIN D’EPICE

C’est en avril 1919, après quatre années de guerre, que la Foire aux pains d’épice  retrouva réellement droit de cité dans la capitale, avec une fête digne de ce nom ! L’inauguration officielle eut lieu le 19 avril 1919. En soirée. Par un temps superbe… Avec, au programme, une magistrale retraite aux flambeaux. L’Intermédiaire Forain s’en fit d’ailleurs l’écho : « Dès 20 heures, une foule compacte, rieuse, attend fiévreusement la retraite aux flambeaux qui doit annoncer l’ouverture de la foire. A 21 heures, départ drapeau en tête, escorté des membres du Comité des fêtes, suivis de la musique, porteurs de torches et terminé par un grand char à sculpture surchargé de porteurs de ballons lumineux.

La foule en délire suit la retraite, longe le boulevard Voltaire où sont massés les Parisiens venus applaudir et encourager les forains qui vont faire revivre les fêtes populaires ».
La lecture des journaux de l’époque nous apprend que la retraite fit son entrée place de la Nation, à 22 heures, suivie d’une foule qui envahit aussitôt la place où la circulation devient vite impossible : manèges, théâtres, tirs, loteries… furent alors pris d’assaut et refusèrent du monde !

 

1921 : LE CINEMA REND HOMMAGE A LA VIE FORAINE

Cette année-là, la maison Pathé sortait un superbe film muet ,« La Hurle », qui, sous la direction de Georges Champavert, rassemblait des scènes de la vie foraine où l’on retrouvait notamment le dompteur Auguste Laurent. On y voyait même à un certain moment un personnage du film y lire « L’Intermédiaire Forain » !

 

1931 : UN MONUMENT POUR LES FORAINS

Il aura fallu dix ans… Dix ans pour qu’un hommage à la hauteur de leur sacrifice soit rendu aux forains morts au combat lors de la Guerre 14/18. En effet, l’idée née en 1921 dans l’esprit d’Alphonse Rancy ne pû aboutir qu’en 1931 avec l’inauguration, à Rouen, du… Monuments aux morts des forains, œuvre du statuaire Real del Sarte.
Tout d’abord l’érection d’un tel monument devait avoir lieu à Neuilly mais la municipalité s’y est opposée. D’autres villes trouvèrent aussi de bonnes raisons de ne pas accueillir un tel monument. Ce ne fut pas le cas de Rouen, qui accueille chaque année de nombreux forains lors de la Saint Romain, notamment.

 

1929 : LE DERNIER VOYAGE DE LA GOULUE

Retirée dans une roulotte installée en bordure d’un terrain vague de Saint-Ouen, où elle vivait avec ses chats et son chien Rigolo, celle qui fit les beaux jours du Moulin Rouge avant de devenir, dès 1894,  un des personnages incontournables de la Foire aux pains d’épices, est décédée en 1929.

Bien des années plus tôt, lorsqu’elle décida d’acheter une baraque foraine à la fête à Neuilly, elle y paraissait aux cotés de Valentin le Désossé. On la retrouva plus tard, associée à Pezon qui lui apprit à présenter des hyènes et des loups, et à dresser des lions. Elle s’installa ensuite à son compte, tourna avec ses fauves, appris l’art du dressage à son fils Simon, et continua de tourner jusqu’à la guerre. L’arrêt des fêtes en août 1914 ne fit que hâter son déclin, même si on la retrouvait ici et là après guerre dans une baraque annonçant : « Ici, La Goulue, du bal du Moulin Rouge ». Après avoir exercé plusieurs petits métiers, sombrée dans l’alcool, la descente est vertigineuse. Seuls sa famille et quelques forains l’accompagnèrent jusqu’à sa dernière demeure au cimetière de Pantin, où elle reposa jusqu’au transfert de son corps au cimetière de Montmartre.

 

1952 :  DANS LES CAGES AUX LIONS…

Cette année-là, à la foire au pain d’épices, le couronnement de l’Esméralda eut lieu dans la cage aux lions du Cirque Fanni. La lionne Sandra, en particulier, était tenue en respect par la dompteuse Sarah Carith lorsque M. Genest, vice-président du conseil Municipal remis les très convoitées  écharpes rouge et bleu à Solange Hermet et à ses demoiselles d’honneur.
La même année, à la ménagerie « La Jungle » de Marffa-la-Corse, le père Louis, aumônier des forains entra aussi dans la cage pour baptiser quatre  jeunes lionceaux, alors qu’à quelques allées de là, Jim Frey, dresseur de son état et auteur de l’ouvrage « Dresseur de fauves », dédicaça son livre dans la cage aux fauves de la Ménagerie Lambert.

 

1954 : FORAINS PARISIENS EN GREVE

Mobilisés contre les mauvais coups qui leur sont portés, notamment contre des mesures visant à supprimer certaines fêtes de la capitale, les forains parisiens firent grève le 4 mai 1954. L’événement fut tel que tous les quotidiens nationaux, ou presque, s’en firent l’écho. La grève se traduisit alors par la fermeture de tous les métiers de la foire du Trône et de la place de la République. Sans compter l’organisation, le 12 mai, d’une grande soirée gratuite pour les Parisiens et les banlieusards !

 

1953 : PLUS DE PEUR QUE DE MAL !

Triste Pâques à la foire aux pains d’épices 53, pour le jeune dompteur Fred Manzano (Fritt Schultz), lors de la troisième représentation de la journée dans la baraque de Jeannette Mac Donald. Le lion Pacha, qui semblait nerveux, se mit difficilement à travailler. Soudain, alors qu’il venait de sauter à travers un cerceau, un hurlement jaillit du public : Pacha venait de se précipiter sur Manzano  en lui labourant la gorge de ses griffes.

Jeannette Mac Donald et un de ses assistants entrèrent alors dans la cage à coups de fouets et de barre afin de faire reculer la bête. Ce qu’ils réussirent à faire, et Manzano, sérieusement blessé du attendre quelque temps avant de reprendre son numéro dans la cage.

 

1964 : PELOUSE DE REUILLY, « AN 1 »

Certains s’en souviennent peut être… C’était sous une pluie battante qu’eut lieu, le 18 avril 1964, la… première inauguration officielle de la Foire du Trône sur la Pelouse de Reuilly.  Un nouveau site où les colonnes de la Nation avaient été remplacées par un mat métallique de 52 mètres, en haut duquel un projecteur de 1000 watts situait au loin la présence de la Foire du Trône déjà signalée, dès l’entrée, par un important motif lumineux constitué de deux énormes chevaux soutenant les Armes de la ville de Paris. Un nouveau site, sur lequel monte chaque année la foire, et auquel participaient alors 240 forains contre près d’un millier dans Paris, en 1911 !