ART FORAIN : LES STYLES ALLEMAND ET BELGE

ART FORAIN : LES STYLES ALLEMAND ET BELGE

Publié le 04/07/2018 dans HISTOIRES FORAINES

 

ART FORAIN

 

3. LES STYLES ALLEMAND ET BELGE

 


Si Angers fut la capitale de l’art forain français, Neustadt sur Orla et Molbitz, en Allemagne, sans oublier Gand, en Belgique, sont aussi des villes très connues des amateurs d’art forain. De grands artistes européens y exercèrent leur art. C’est d’ailleurs là, dans leurs ateliers, que prirent forme et s’épanouirent les styles allemand et belge…

 

 

 

Le style Allemand

 

Friedrich Heyn, Karl Müller, Carl Alexander Schulze, Josef Hübner, Fritz Bothmann… sont les « maîtres » les plus connus de l’école allemande. Une école, un style dont la noblesse et l’apparat semblent être les maître-mots.

 

De nombreuses similitudes apparaissent entre les écoles française et allemande. Une ville, dans chaque pays, semble avoir été « LA » capitale de l’art forain. Angers pour l’une, Neustadt sur Orla pour l’autre. Dans l’un et l’autre pays, la production a été importante jusqu’à la Première Guerre Mondiale qui donne un coup d’arrêt à cette « industrie » de fête, avant de reprendre de plus belle après-guerre. Du moins jusqu’aux années de crise qui marqueront un nouveau coup d’arrêt.

 

Tout se passe donc, ou presque, en Saxe. A Neustadt sur Orla, plus précisément. Une région où le travail du bois s’inscrit dans la tradition. Une région où, écrivent Fabienne et François Marchal dans leur très documenté ouvrage sur l’art forain, les « habitants se mettent à sculpter des animaux de manèges pour tenter de les vendre sur le marché qui pointe. Certains même s’essayent à construire leur propre manège. (…) Les plus entreprenants enfin tentent de monter leur atelier (…) ». C’est notamment le cas de Friedich Heyn, à l’origine du style allemand.

 

Le petit atelier des débuts deviendra « la plus ancienne et la plus importante fabrique de manèges et de sujets de manèges d’Europe », ainsi qu’il le rappelle dans son catalogue de 1905. Une fabrique qui continue de tourner sous le nom de Heyn, même après qu’il l’ait cédée à Richard Keime. Si les amateurs connaissent et apprécient les chevaux de Gustave Bayol, ceux de l’école allemande ont beaucoup de classe.

 

Les chevaux, aux oreilles toujours pointées vers l’avant, sont classés en chevaux ordinaires, de parade, de gala, de Triomphe ou « Excelsior »… autant de catégories qui correspondent à la richesse et au foisonnement du harnachement, au décor de tapis de selle, aux incrustations de miroir de Bohème (la région de Neustadt sur Orla et de Molbitz)  ou de pierreries multicolores.

 

Freiedrich Heyn définit ses chevaux comme très fins et très simples. Expression douce, pattes nerveuses, têtes présentant un chanfrein long et franc souligné par une double veine apparente… De leur côté, ceux de Josef Hübner sont identifiables à leur tapis de selle en forme de W. A noter que le style allemand a très largement développé les accessoires et autres ornements : tapis de selle, pommeaux, etc.

 

Outre F. Heyn et J. Hübner (auquel on doit la cavalerie de l’Hippo Palace de Faure Wilbert), l’école allemande a également retenu les noms de Karl Müller, ex-associé de Heyn qui, associé à Thümmel, va produire de nombreux animaux exotiques – une des particularités de l’école allemande- etc. La bride-licol créée par les ateliers Müller- Thümmel : la marque de fabrique de la maison.

 

Autres noms, et non des moindres à figurer au Panthéon de l’art forain allemand ; Alfred Poepping et Carl Alexander Schulze et leurs carrousels, Fritz Bothmann dont l’atelier situé à Gotha produit aussi bien des chevaux de bois et des gondoles que des métiers complets, des roulottes ou du matériel pour cirques. Parmi les métiers sortis des ateliers Bothmann, citons pêle-mêle, des manèges d’aéroplanes, de balançoires, de bateaux, d’autos, sans oublier les roulottes exportées dans de nombreux pays, telles la France ou la Suisse…

 

 

 

Le Style Belge

 

Gand est sans aucun doute la capitale belge de l’art forain, et Alexandre Devos, d’abord sculpteur d’art religieux (comme Gustave Bayol, en France), le plus célèbre des artistes Belges. En 1880, il aurait été sollicité pour la fabrication d’un manège. Et, c’est ainsi que serait née sa vocation…et un style baroque, imprégné de culture antique à laquelle il emprunte chimères, masques grotesques etc. 

 

Alexandre Devos, comme l’écrivent Fabienne et François Marchal dans leur ouvrage sur l’art forain, « s’était spécialisé dans les décors monumentaux de manèges, fournissant des façades, des frontons, des tours de mâts parsemés de miroirs portant sa signature, des statues, des gondoles, des décorations intérieures et extérieures de carrousels-salons. Bon nombre de grands galopants du début du siècle sont sortis de ses ateliers ». Son rayonnement est tel qu’avec Bayol, Savage, Heyn et quelques autres, il rayonna au firmament de l’art forain.

 

Les observateurs les plus attentifs disent qu’il utilise l’épaisseur comme mise en volume, pour mieux souligner une évidence. Il excella aussi dans la statuaire dont il surchargeait ses façades monumentales. D’ailleurs, ses groupes équestres aux entrées des carrousels salons sont nobles et majestueux. Son goût pour l’allégorie est très certainement à l’origine du gigantisme, de la démesure que l’on retrouve sur certains grands métiers du début du vingtième siècle. Son fils, Henri Devos, fit son apprentissage dans les ateliers paternels, à Gand, avant de rejoindre les ateliers Coquereau et Maréchal, à Angers, et s’installer à son compte, dans cette ville.

 

Mais revenons Outre-Quiévrain avec Jules Moulinas, qui travailla avec Alexandre Devos avant de s’émanciper pour développer son propre style, plus lyrique et plus fluide.

 

Jules Moulinas fut l’un des premiers à mêler art baroque et Art Nouveau avant de sacrifier au Modern-Style.

 

Bernard Van Guyse, qui travailla un certain nombre d’années avec Jules Moulinas, finit lui aussi par se mettre à son compte et se consacrer pleinement à la sculpture animalière. D’aucuns disent même qu’il est le plus ancien sculpteur animalier belge. Vérité oblige à reconnaître qu’après des productions dépouillées, des chevaux inspirés du style allemand, il s’oriente vers des  personnages tels que Donald, des singes en haut de forme et redingotes, etc.

 

Enfin, parmi les plus récents artistes de l’école belge, Bernard Kindt qui, dès l’âge de 20 ans, se lance dans la sculpture foraine. Il faudra toutefois attendre quelques années pour qu’il ouvre son propre atelier et se consacre uniquement à la sculpture foraine, puisant ses idées dans les ouvrages pour enfants.