CINEMA

CINEMA

Publié le 09/08/2017 dans ACTUALITES

 

VALÉRIAN ET LA CITÉ DES MILLE PLANÈTES

 

Les flics de l'espace

 

Année 2740… Des millions de créatures issues de toute la galaxie vivent en paix sur la station orbitale Alpha, partageant leur culture et leurs savoirs en harmonie. La présence d'un fort taux de radioactivité en son coeur inquiète les autorités. Le major Valérian et le sergent Laureline enquêtent sur ce mystère, alors qu'une peuplade extraterrestre menacée d'extinction craint pour sa survie. Quelques décennies après avoir découvert la BD de Pierre Christin et Jean-Claude Mézières, Luc Besson adapte leur univers sur grand écran. Ce récit d'aventures futuristes avec créatures et vaisseaux futuristes est porté par une quête d'émerveillement quasi enfantine. Après une première partie prometteuse, on déchante petit à petit, sans être totalement déçu. Le réalisateur peine à creuser la psychologie des personnages et à développer un scénario aux enjeux vibrants. Son héros n'est guère charismatique, Dane De Haan semblant trop jeune pour cet emploi de James Bond de l'espace, son alchimie avec Cara Delevingne étant bien ténue. La distribution inclut Rihanna en créature aux multiples visages et Alain Chabat en pirate évadé du monde sous-marin de Bob l'éponge.

 

 

 

Lola Pater

 

Farid et ses deux mères

 

À la mort de sa mère, Zino, fils d'immigrés algériens, part retrouver son père Farid qu'il n'a pas vu depuis plus de vingt ans. Il rencontre Lola, professeur de danse, qui semble habiter avec lui. Il ignore que Farid et Lola ne sont qu'une seule et même personne. Nadir Moknèche s'intéresse une nouvelle fois, après «Le Harem de Mme Osmane», «Viva Laldjérie» ou «Goodbye Morocco» à une femme libre tentant de vivre à 100% sa féminité face à une société hostile à toute forme de marginalité ou d'indépendance sexuelle. Loin de proposer un film dérangeant pour dépeindre cette relation parentale surprenante, il apaise les conflits attendus tout en affrontant les questions qui peuvent déranger. Il fait partie de ces auteurs doués pour faire évoluer les mentalités sans donner de leçon et le prouve encore avec ce drame solaire au fatalisme positif. Fanny Ardant incarne avec un bel équilibre ses deux identités même s'il n'est pas aisé de faire abstraction de son parcours. L'émotion perce pourtant grâce à la sensibilité du cinéaste et de son actrice pour faire vivre ce personnage haut en couleur. Tewfik Jallab affiche une sensibilité à fleur de peau en jeune homme confronté à ses origines.

 

 

 

La Planète des Singes - Suprématie

 

Full Metal Macaque

 

La guerre entre humains et singes bat son plein. Malgré les tentatives de César pour restaurer la paix, son rival le Colonel est décidé à éradiquer la population simienne. Meurtri par une attaque sournoise, César va partir en guerre pour un affrontement qui déterminera l’avenir de la planète. Avec ce dernier volet d'une trilogie à l'ampleur philosophique croissante d'épisode en épisode, Matt Reeves met un point final parfait à cette nouvelle version de «La Planète des Singes» dont les animaux auront été le coeur et l'âme. Le récit de vengeance attendu se heurte à l'humanité inoxydable de César et de son interprète Andy Serkis. On ne voit pas l'acteur à l'écran mais grâce à l'enregistrement précis de ses mouvements physiques et de son jeu par ordinateur, il aura prouvé qu'il n'est pas nécessaire d'apparaître en chair et en os pour véhiculer une émotion profonde. Woody Harrelson est un peu plus caricatural en méchant inspiré de Marlon Brando dans «Apocalypse Now» mais reste à la marge de l'histoire. Après «Wonder Woman», «Spider Man Homecoming» et «Dunkerque», les grosses productions américaines auront éclairé l'été 2017 pour le plus grand plaisir des amoureux de cinéma.

 

 

 

Les Proies

 

Dans les griffes de sept femmes

 

Au coeur de la Guerre de Sécession... Gravement blessé, le caporal John McBurney est recueilli dans un pensionnat où vivent cinq jeunes élèves, une enseignante et la directrice. Miss Martha prend la décision d'héberger et de soigner le nordiste, au lieu de le dénoncer aux confédérés. L'atmosphère se charge vite d'une vive tension. Sofia Coppola a reçu le prix de la mise en scène au Festival de Cannes avec ce western en chambre. Elle adapte un roman déjà filmé par Don Siegel au début des années 70 avec Clint Eastwood dans le rôle de ce soldat pris au piège de désirs féminins exacerbés par une vie chaste. Ce remake, moins troublant, est relevé par une ironie féroce et une belle distribution. Colin Farrell apporte une fragilité à ce héros bien faible devenu proie d'une gynécée éveillée par ce mâle perturbateur malgré lui. Certaines scènes sont savoureuses, dont un dîner où l'assemblée rivalise de charme pour le séduire. Le décalage presque humoristique, qui nuit à l'atmosphère qui se veut érotique, est accentué par la performance ambiguë de Nicole Kidman, glaçante et drôle lorsqu'elle sort certaines répliques, son «va chercher le manuel d'anatomie» faisant naître un rire inattendu.

 

 

 

Mort à Sarajevo

 

L'Europe est morte plusieurs fois

 

L’Hôtel Europe à Sarajevo, est en effervescence avec l’arrivée des prestigieux invités de la célébration du centième anniversaire de l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand d’Autriche. Dans les coulisses se joue l’avenir de ce palace menacé de faillite. Le bosniaque Denis Tanovic interroge les drames de son pays et du continent avec cette très libre adaptation de «Hôtel Europa», pièce de théâtre de Bernard-Henri Levy jouée sur place à l’occasion de cette célébration. Il mêle la Grande Histoire à celle, non moins peu glorieuse, de l’époque actuelle. Le palace où se déroule l'action symbolise les passions d’une Europe morte déjà plusieurs fois, en 1914, avec la Shoah ou lors des massacres perpétrés en ex-Yougoslavie, selon les propos d’un homme que l’on voit répéter un discours dans sa chambre. Une distance comique se crée avec ses hésitations de politicien satisfait d’avoir trouvé une belle formule sur un sujet grave mais ses propos sont d’une rare force sur le devoir de mémoire. À travers les tensions toujours vivaces entre serbes et croates, le réalisateur libère une parole indispensable, sans donner de leçon mais en invitant à une réflexion salutaire pour l'avenir.

 

Wind River

 

Une vengeance froide

Une jeune femme est retrouvée morte dans la neige dans la réserve indienne de Wind River. Le pisteur local Cory Lambert apporte son aide à la jeune recrue du FBI venue élucider ce crime sordide. Meurtri par la disparition de sa fille, il n'est guère enclin à faire preuve de retenue dans cette enquête difficile. Reconnu comme scénariste («Sicario» de Denis Villeneuve, «Comancheria» de David Mackenzie), Taylor Sheridan passe derrière la caméra avec ce film très noir situé dans l’immensité sauvage du Wyoming. À travers cette fiction désespérée, il a voulu exprimer son soutien à une communauté amérindienne meurtrie en dénonçant les violences dont elle est victime, rappelant qu'elle n'obtient que très rarement justice. Jeremy Renner, acteur à l'animalité joliment exploitée ici, fait passer les états d'âme de son personnage abîmé par la vie par son visage tourmenté. Il est secondé par la discrète Elizabeth Olsen, sa partenaire dans les «Avengers» en agent débutante contrainte de s'adapter à la rigueur du froid et des âmes. La mise en scène est sèche et percutante mais la dimension sociale et politique est évacuée au profit d'une efficacité dans la violence et des dialogues peu subtils.

 

 

 

 Pascal LE DUFF