CINEMA

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Publié le 10/12/2018 dans ACTUALITES

 

Spider-Man : New Generation
Des mondes d'araignées

Miles Morales vit paisiblement à Brooklyn avec son père policier. Alors qu'il dessinait des graffitis avec son oncle, il est piqué par une araignée radioactive et devient le nouvel Homme-Araignée. Contrairement à ce que les fans de comics ont longtemps cru, il existe plus d'un Spider-Man en activité. Le prologue nous dévoile le héros auquel nous sommes habitués mais Peter Parker cède rapidement la place à un adolescent afro-américain timide mais débrouillard. C'est en se plongeant dans les bandes dessinées sur son modèle qu'il va apprendre, avec grande difficulté, à utiliser ses pouvoirs. Soutenu par d'autres super-héros arachnoïdes inattendus venus de mondes parallèles (dont un bien surprenant spider-cochon), il doit contrer les plans du colossal Caïd. Meurtri par la disparition de sa femme et de son fils, ce parrain du crime impitoyable est prêt à tout pour les retrouver dans une autre dimension à l'aide d'un appareil diabolique. S'il est mis en route, le Synchrotron détruira la galaxie toute entière. Cette première version animée de Spider-Man sur grand écran est complexe à appréhender pour le commun des mortels mais réjouira les «mordus» de cette vaste toile.

 

 

 

Leto
Perestroïka Rhapsody

 

Union Soviétique, milieu des années 80. Bientôt la Perestroïka. Viktor Tsoi, rocker prometteur, est remarqué par Mike Naumenko. Leader d'un groupe populaire, il le prend sous son aile et ne se vexe pas lorsque Viktor tombe sous le charme de sa femme. Ce film musical et politique de Kirill Serebrennikov fut le grand rayon de soleil de la compétition du dernier Festival de Cannes, grâce à des protagonistes à la vitalité éclatante et à une mise en scène solaire. Les chansons des artistes russes se mêlent aux tubes d'Iggy Pop ou de Lou Reed, illustrées par d'inventives incrustations animées au milieu des acteurs. Le ton badin est porteur d'espoir mais ces visions positives de la démocratisation du pays sont recadrées par un narrateur sceptique qui invite à se méfier de toutes les propagandes. L'oppression des corps dans la salle de concert lors de la séquence d'ouverture reflète celle des esprits et la privation générale de liberté. À travers ce film, le réalisateur, assigné à résidence depuis août 2017, revendique une libération (dont il a depuis été privé) par l'imaginaire en célébrant le pouvoir de la musique pop, véhicule d'émotions universelles et complice de l'envie de renverser l'ordre établi.

 

 

 

Pupille
Attendre un enfant

 

Accompagnée par les services d'aide sociale, Alice Langlois, la quarantaine, essaie depuis dix ans d'adopter un enfant. Théo, abandonné par sa mère biologique le jour de sa naissance, est recueilli par Jean, assistant familial, qui s'était pourtant juré de ne plus s'occuper d'enfant après une mauvaise expérience. Karine, assistante sociale, l'a convaincu de revenir sur sa décision. Jeanne Herry («Elle l'adore») dépeint patiemment les étapes d'un accouchement sous X. Au delà de l'impressionnant travail documentaire sur les divers métiers à l'oeuvre, la dimension humaine n'est jamais oubliée. On suit des professionnels au travail mais aussi, sans s'appesantir, dans leur intimité. L'émotion est forte lorsqu'on découvre les détresses de Gilles Lellouche, séparé d'un enfant auquel il s'est attaché, de Sandrine Kiberlain amoureuse déçue ou d'Elodie Bouchez dans sa lutte patiente pour devenir mère. Clotilde Mollet au phrasé particulier, est Mathilde, la recueillante qui s'intéresse à la parole de la mère biologique, anticipant les interrogations futures du bébé. Lorsque la parole prend le risque de devenir envahissante, l'émotion revient, délicatement amenée, avec même quelques dosettes d'humour.

 

 

 

Astérix - Le Secret de la Potion Magique
Qui veut être druide à la place du druide ?

 

Le village des irréductibles gaulois est en émoi. Après une vilaine chute, Panoramix veut préparer sa succession. Accompagné d’Astérix et Obélix, il part en quête d'un apprenti à qui transmettre le secret de sa potion magique qui fait toujours autant d'envieux… Responsables du très réussi «Le Domaine des dieux» Louis Clichy et Alexandre Astier retrouvent les valeureux Astérix et Obélix pour une aventure inédite qui dévoile quelques secrets sur l'histoire de Panoramix. Le premier est désormais doublé par Christian Clavier (en remplacement de Roger Carel) et le deuxième à nouveau par Guillaume Briat qui en respecte la poésie bonhomme. Un peu moins dynamique, cette suite aux faux airs de «druide-crochet» a de jolis moments dont un flash-back à peine esquissé au crayon ou le combat final entre deux étranges créatures dont l'une composée de pauvres légionnaires romains. On rit des éternelles mésaventures des pirates les plus malchanceux du monde et de certaines candidatures fantaisistes au poste de druide. Sulfurix est un méchant au fort potentiel mais un peu décevant, malgré la voix parfaitement sentencieuse de Daniel Mesguich.

 

 

 

Lola et ses frères
Notre petite sœur est amoureuse

 

Benoît se marie pour la 3ème fois. Son frère Pierre arrive très en retard et se fâche avec sa belle-soeur. Leur cadette Lola, avocate célibataire, laisse percevoir sa mélancolie à la cérémonie. Peu après, elle tombe sous le charme de Zohar, un de ses clients dont le divorce vient d'être prononcé. Malgré les engueulades et les cachotteries, la fratrie est fusionnelle… Jean-Paul Rouve a écrit son quatrième long-métrage avec l'écrivain David Foenkinos dont il avait déjà adapté «Les Souvenirs». Il tient le rôle de l'aîné et José Garcia, étonnamment vulnérable, celui du fragile Pierre, écrasé par les soucis de couple et de travail qu'il cache à sa famille. Ludivine Sagnier est charmante en jeune femme à la fois petite sœur à protéger et mère de substitution. Moins gaie qu'elle ne le prétend, elle est plombée par son désir d'enfant et une dépression sourde. Ramzy Bedia sort de son registre pour jouer avec «délicatesse» Zohar, rapidement adopté au sein du trio car il leur apporte à tous un bien-être qui leur faisait défaut. Jean-Paul Rouve déroule finement une mosaïque de sentiments avec des personnages attachants dont la maladresse heurte des liens indéfectibles.

 

 

 

Une Affaire de famille
On choisit bien sa famille

 

Osamu pratique avec maestria le vol à l'étalage, avec la complicité de son fils Shota. Ils aperçoivent un soir Yuri, petite fille maltraitée par ses parents et décident de la recueillir. Elle rejoint également Hatsue, grand-mère aux drôles de combines, Nobuyo, la mère qui travaille dans une blanchisserie et Aki, la fille aînée qui gagne sa vie en se déshabillant derrière des vitres. Ces marginaux très modestes vivent entassés dans un minuscule appartement, à l'écart de la société. Après «Nobody knows» ou «Notre petite soeur», Kore-eda Hirokazu pousse plus loin le curseur de ses interrogations sur les liens du sang. Ce récit d'une communauté attachante, malgré des actes délictueux ou immoraux, a obtenu la Palme d'or au Festival de Cannes. Quelques indices dans les dialogues et attitudes des personnages annoncent une vérité qui éclatera à la suite d'un malencontreux incident. Kore-eda expose une violence sociale sourde en faisant preuve d'empathie avec une cellule familiale éloignée des carcans de de la structure idéale japonaise. La subtilité de l'interprétation rejoint celle d'une écriture émotionnellement déchirante, dénuée de complaisance ou de jugement hâtif.

 

  

 

Pascal LE DUFF