CINEMA

CINEMA

Publié le 07/05/2019 dans ACTUALITES

 

Les Crevettes pailletées
Le Gay Bain

 

Mathias Le Goff, vice-champion du monde de natation, tient des propos homophobes lors d'une interview. Afin de redorer son image, sa Fédération l'oblige à entraîner une équipe de water-polo composée uniquement d'homosexuels en vue des Gay Games en Croatie. Le défi est de taille, ses joueurs semblant plus doués pour la fête que pour le sport. Quelques mois après «Le Grand bain», une autre équipe de sportifs amateurs va dépasser ses faiblesses pour remporter un trophée. On est heureusement loin de la copie communautaire avec cette comédie audacieuse. La troupe est homogène, malgré des parcours variés. Alban Lenoir prête son sourire contagieux à Jean, fondateur de l'équipe à la bonne humeur constante alors qu'il cache un lourd secret. Le langage de ces joyeux drilles n'est guère châtié, mais au-delà de la provocation, les réalisateurs Cédric Le Gallo et Maxime Govare n'édulcorent en rien les questionnements de genre de leurs personnages. Nicolas Gob («Un Village français») joue parfaitement le candide apprenant à dépasser ses préjugés lorsqu'il plonge dans cet univers pour le moins typé. Un joli éloge de la liberté des mœurs et du droit à la différence, avec une légèreté assumée.

 

 

 

Cold Blood Legacy
La mémoire du sang

 

Henry est un tueur à gages précis, capable d'abattre sa cible dans un sauna à l'aide d'une balle faite de glace. Entre deux commandes, il vit dans une cabane isolée au bord d’un lac gelé. Après une sévère chute en motoneige, une jeune femme est grièvement blessée. Elle rampe jusqu'à sa retraite. Il prend soin d'elle mais la prévient qu'il est préférable qu'elle ne reste pas longtemps… Jean Reno retrouve un personnage à la «Léon» en moins autiste, un expert de l'exécution discret, usé mais toujours agile. Le français Frédéric Petitjean dirige un polar maladroit, probablement un peu victime de son statut de coproduction hétéroclite, entre les Etats-Unis et l'Ukraine. Le cadre policier est peu crédible et les quelques séquences impliquant les enquêteurs sont au mieux inutiles, au pire dénuées de crédibilité. C'est l’huis-clos dans l'abri montagneux de l'hirsute exécuteur qui suscite un peu d'intérêt. Les échanges entre l'hôte et son invitée ne sont pas passionnants mais se déroulent sur un rythme doux qui privilégie la psychologie à l'enchaînement de scènes d'action, rares mais dirigées avec soin. L'explication finale s'avère à la fois évidente et exagérément tarabiscotée.

 

 

 

Avengers Endgame
La fin fait partie du voyage

 

Les Avengers sont désemparés. Comment vivre après le génocide de la moitié de la population  provoqué d'un claquement de doigts par Thanos ? L'équipe de super-héros a été largement réduite et il ne reste désormais que les membres d'origine (Captain America, Iron Man, Thor, Hulk, la Veuve Noire, Hawkeye), secondés par Ant-Man, Rocket Raccoon et Nebula des Gardiens de la Galaxie et Captain Marvel. Les rescapés vont mener leur plus important combat pour rendre justice à leurs proches devenus poussière. La première partie, poignante, voit les survivants abasourdis chercher un sens à leur deuil. Certains résistent, d'autres ont baissé les bras. L'astuce de scénario sous-entendue dans «Infinity War» et «Ant-Man et La Guêpe» permet de revisiter sous un nouvel angle des scènes des précédentes aventures des Avengers. Malgré une intensité réelle, ce 22ème film Marvel est un long épilogue au précédent opus qui s'achevait sur un final tragique marquant. La mise en danger relative de ces êtres quasiment immortels atténue l'émotion visée, même si quelques adieux ont une réelle portée dramatique. Les fans verseront quelques larmes, les moins fervents risquent de trouver le temps long.

 

 

 

Gloria Bell
La cinquantaine conquérante

 

Divorcée depuis longtemps, Gloria Bell, cinquante ans, aime boire et danser dans les dancings pour célibataires de Los Angeles. Un soir, elle rencontre Arnold, récemment séparé de sa femme. Leur passion naissante est mise à mal par les atermoiements de son nouvel amant. Le chilien Sebastián Lelio transpose en Amérique le remake de son propre film tourné dans son pays natal. Julianne Moore, à l'initiative du projet après avoir découvert l'oeuvre d'origine à Paris, embrasse avec fougue la personnalité d'une femme complexe qui semble assumer sa solitude, tout en cherchant à s'épanouir pleinement. Ses élans la rapprochent d'un homme touchant mais indécis, auquel John Turturro apporte une jolie fragilité. L'histoire presque banale est transcendée par l'humanité de ses personnages et deux acteurs à la belle alchimie. Gloria n'est heureusement pas seulement une battante se démenant pour maîtriser le cours de sa vie mais un être humain normal, solaire ou sombre selon les circonstances. L'enchaînement maîtrisé des chansons donne à cette fable d'aujourd'hui de faux airs de comédie musicale. Une œuvre sans concession qui parvient à n'être ni trop grisâtre ni trop rose.

 

 

Victor et Célia
Leur petite entreprise de coiffure

 

Victor et Ben sont sur le point de réaliser leur rêve, ouvrir leur salon de coiffure, lorsque ce dernier se tue en scooter. Endeuillé, son ami a déjà investi beaucoup d'argent et ne peut pas renoncer. Il propose à Célia, son ex de l’école de coiffure, de devenir son associée. Ils vont se battre pour faire vivre leur petite entreprise. Pierre Jolivet s'est entouré d'un attachant duo de comédiens, Arthur Dupont et Alice Belaïdi, pour incarner ces coiffeurs passionnés qui vont travailler ensemble avant de voir leurs sentiments se raviver. Lui, un brin foufou, prend des risques démesurés alors qu'elle est trop réfléchie. Ils vont faire des pas l'un vers l'autre afin de trouver un juste milieu. Moins profonde que ses longs-métrages les plus dramatiques, cette charmante comédie romantique possède une légère contextualisation sociale, pondérée par la résolution parfois rapide de leurs abondants problèmes. Certes un peu trop futile, elle atteint son but de divertir, tout en insistant sur la difficulté pour les trentenaires les plus motivés de s'en sortir. Le comptable pragmatique est joué par le chanteur Benabar qui revient au cinéma des années après «Incognito». 

 

 

 

Séduis-moi si tu peux !
Les opposés s'attirent

 

Journaliste d'investigation au chômage, Fred retrouve Charlotte qui fut sa baby-sitter vingt-cinq ans plus tôt. Désormais Secrétaire d'état, elle lui demande d'écrire ses discours pour l'élection présidentielle. L'équipe de campagne s'inquiète de leur rapprochement et ne ménage pas ce prétendant débraillé au franc-parler potentiellement embarrassant. La complicité du couple naissant se heurte à la pression de la course à la Maison Blanche. Charlize Theron s'impose aisément dans la comédie, genre dans lequel elle ne s'était pas vraiment imposée jusque-là. Malgré le cadre rigide de sa fonction de femme politique, Charlotte est fragile et maladroite. L'actrice vole aisément la vedette au pourtant excellent Seth Rogen car elle nous surprend, loin de «Mad Max Fury Road», alors que son partenaire est dans son élément usuel. Au-delà de l'humour et du romantisme dignes des meilleures comédies romantiques, ce qui distingue celle-ci est sa dimension adulte et politique. Pas seulement le combat écologique de la candidate au bureau ovale mais aussi le propos féministe mettant en valeur une femme qui ne sacrifie en rien ses ambitions professionnelles à sa quête d'affection.

 

 

 

Pascal LE DUFF