JACQUES INAUDI - LE MAGICIEN DES CHIFFRES

Publié le 24/05/2017 dans HISTOIRES FORAINES

 LIVRE D'OR DES GLOIRES DE LA FETE

Jacques Inaudi, véritable magicien des chiffres, se produisit des années durant sur les fêtes et les foires de l’Hexagone. Un sacré parcours suivi à l’époque par L’Intermédiaire Forain et l’Inter Forain. Une  bien belle histoire…

C’est à Champigny, alors dans le département de la Seine, dans sa maison de la rue Saint Eugène, sur les bords de Marne, que l’Inter Forain, avait rencontré (au printemps 1949) quelques mois avant son décès, Jacques (Giacomo) Inaudi, calculateur prodige qui fit plusieurs tournées avec son Royal Concordia, puis avec le Théâtre-Salon Benevol.

 

Dès l’âge de 5 ans…

 

Yeux bleus, regard vif, coiffé d’une vieille casquette et habillé comme au Second Empire, il racontait alors au « Rose » qu’il avait commencé à calculer dès l’âge de 5 ans, âge où il devint berger. « Je m’amusais à compter les fenêtres des maisons, les lucarnes, les arbres et les personnes que je rencontrais. Je comptais sans répit… » expliquait-il.
Et, de rappeler que, dès qu’on lui eut expliqué comment obtenir le cube d’un nombre, il comprit que le calcul était très simple. Il n’avait pas plus de 7 ans qu’il comptait déjà comme il le faisait devenu adulte !
Curieux bonhomme que ce Jacques Inaudi  qui expliquait aussi que dans ses nuits d’insomnie, les chiffres faisaient des rondes et qu’il portait ainsi des sommes, croyant se calmer, jusqu’à leur sixième puissance alors que d’autres comptent les moutons !
Sa mère décéda alors qu’il n’avait que 5 ans. Il quitta le Piémont avec son père et ses deux frères pour la France. S’il devint « montreur de marmottes savantes » les jours de foires et de marchés, c’est davantage avec les chiffres qu’il gagna sa vie. Les maquignons, qui très vite décelèrent ses dispositions pour le calcul mental lui faisaient faire leurs comptes à moindre frais…

 

Le Petit Marseillais s’intéresse à lui

 

En 1880, il fut engagé comme chasseur au Café du Louvre à Marseille. Il s’y fit remarquer en calculant de tête à une rapidité incroyable les notes des clients. Il n’en faut pas plus pour que Le Petit Marseillais fasse paraître sa photo dans le journal citant ses prouesses à l’appui.
Chacun voulant alors mettre son savoir à l’épreuve, le café ne désemplissait pas.
Du moins jusqu’à ce qu’un certain Dombey,  représentant en horlogerie, passa par là et s’intéressa à lui. Il dédommagea – assez mal dit-on - le frère d’Inaudi, et l’emmena avec lui à Saint-Etienne puis à Paris où il entendait lui faire poursuivre des études en mathématiques. Il le présenta alors au professeur Paul Broca, anthropologiste, spécialiste de la cranologie qui l’examina et  lui déconseilla vivement l’enseignement classique des mathématiques citant Mondeux qui, pourtant miraculeusement doué pour le calcul, perdit ses facultés dès qu’on lui enseigna les maths de manière classique et traditionnelle.

 

Devant l’Académie des Sciences

 

Jacques Inaudi n’alla donc pas à l’école, mais finit tout de même par apprendre à lire et à écrire. Il se maria avec la fille de son bienfaiteur et se lia avec De Thorcey, habile prestigitateur. Après s’être produit à Paris, salle des Capucines et sur la scène du Théâtre Robert-Houdin et sur de nombreuses foires de province, il commença une grande tournée à travers l’Europe, avec un détour par les Etats-Unis !
Notre mathématicien voyageur partit alors en Angleterre où il stupéfia Edouard VII qui le reçut en visite privée. Il confondit même notre ministre des Finances sur une erreur de plusieurs milliards. Ce qui le rendit encore plus célèbre auprès du public.
Présenté à Paris, en 1892, devant l’Académie des Sciences, il exécuta de mémoire et avec une rapidité déconcertante les plus difficiles calculs imposés notamment par Charcot et Poincaré. Et s’en sortit de la manière la plus honorable qui soit !

 

En tournée avec le Royal Concordia

 

En Amérique, il se joua de la technique en battant de vitesse vingt-sept machines à calculer différentes.
Curieux bonhomme que ce Jacques Inaudi qui se produisit sur tous les champs de foire ou presque… D’abord avec son propre établissement, The Royal Concordia, dont l’affiche annonçait :  « Le prodigieux calculateur Jacques Inaudi, présenté à l’Institut le 8 février 1892 par M. Darboux, Doyen de la faculté des Sciences ». On le retrouva ensuite (de 1929 à 1934 semble-t-il) en tournée  avec le Théâtre-Salon Bénévol aux côtés d’une pléiade d’artistes tels le mage Roskoff, Mlle Andress, les Violettis et bien d’autres encore… mais aussi sur les plus grandes scènes d’Europe, dos tourné au tableau noir, face au public, et donnant les réponses exactes aux problèmes posés derrière lu,i tout en discutant de choses et d’autres avec les spectateurs. En toutes les langues car notre homme était aussi polyglotte. Retiré à Champigny-sur-Marne depuis 1934, suite à une laryngite chronique, Jacques Inaudi qui tourna longtemps sur les champs de foire, y décéda en 1950, toujours passionné par les chiffres !